Main-d'œuvre en veille : l'Allemagne face à un défi de sous-emploi
En Allemagne, une étude récente révèle que le pays ne tire pas pleinement parti de son potentiel de main-d'œuvre. Environ 5 millions de travailleurs sont sous-utilisés, notamment parmi les femmes sans enfants, les mères à temps partiel, les migrants et les travailleurs âgés. Ce manque d'exploitation des compétences freine la croissance économique du pays, déjà confronté à une pénurie de personnel qualifié. Pour remédier à cette situation, des réformes structurelles et des incitations sont nécessaires afin d'intégrer ces groupes sous-représentés dans le marché du travail et renforcer l'économie allemande.
2. Le cas des femmes sans enfants et des mères à temps partiel
3. Les travailleurs migrants et âgés : des réserves importantes
4. Solutions pour une meilleure utilisation de la main-d'œuvre en Allemagne
5. Vers une activation du potentiel inexploité
Une récente étude commandée par la Stiftung Familienunternehmen révèle que l'Allemagne ne tire pas parti de tout son potentiel de main-d'œuvre, avec environ 5 millions de travailleurs dont les compétences restent inexploitées. Ce chiffre inclut diverses catégories de travailleurs tels que les femmes sans enfants, les employés sans diplômes professionnels, les mères en emploi partiel, les migrants, ainsi que les travailleurs âgés de 50 à 70 ans. Selon les économistes de l'Institut für Angewandte Wirtschaftsforschung de l'Université de Tübingen, ce phénomène freine considérablement la croissance économique du pays.
En parallèle, l'Allemagne fait face à l'un des taux les plus élevés de postes non pourvus parmi les pays industrialisés. Les chercheurs soulignent également que le nombre d'heures travaillées par personne en Allemagne est nettement inférieur à celui des autres pays industrialisés. Cette sous-exploitation des travailleurs est considérée comme un frein majeur au développement économique, accentuant les problèmes liés au manque de personnel.
Une partie importante du potentiel non exploité concerne les femmes, notamment celles sans enfants et les mères en temps partiel. L'étude révèle que ces catégories de femmes représentent une grande part de la main-d'œuvre inactive ou sous-utilisée en Allemagne. Le système du mariage et de l'Ehegattensplitting est l'un des principaux obstacles à l'augmentation de leur participation à l'emploi à temps plein. Ce système fiscal favorise les ménages avec un seul revenu, souvent celui de l'homme, décourageant ainsi les femmes de chercher des emplois à temps plein.
L'étude propose la suppression de l'Ehegattensplitting afin de motiver davantage de femmes à intégrer le marché du travail de manière plus active. De plus, l'amélioration des infrastructures de garde d'enfants est également une solution clé pour permettre aux mères de travailler davantage. Le soutien à la création de crèches en entreprises (Betriebs-Kitas) est mentionné comme une mesure essentielle pour encourager une plus grande flexibilité pour les familles.
Les migrants et les travailleurs âgés représentent également un potentiel significatif sous-utilisé. En particulier, les femmes migrantes ont un taux de participation à la vie active bien inférieur à celui des hommes de leur communauté. Les Agences pour l’emploi en Allemagne sont encouragées à inciter ces femmes à suivre des cours de langue allemande et à obtenir des qualifications professionnelles, des éléments essentiels pour intégrer le marché du travail.
Quant aux travailleurs âgés (entre 50 et 70 ans), la retraite anticipée à 63 ans est pointée du doigt comme une des causes de la sortie prématurée de la vie active. L'étude recommande de réformer cette mesure afin d'encourager les travailleurs plus âgés à prolonger leur carrière, dans un contexte où la population vieillissante continue de croître.
Les chercheurs suggèrent plusieurs pistes pour optimiser l’utilisation de la main-d'œuvre en Allemagne. Premièrement, la réforme du système fiscal en supprimant l'Ehegattensplitting permettrait de réduire l'inégalité de genre sur le marché du travail. Deuxièmement, limiter les Mini-Jobs serait un autre levier efficace, car ces petits boulots souvent occupés par des femmes réduisent leurs perspectives d'évolution vers des emplois à temps plein.
Le développement des infrastructures de garde d'enfants, notamment les crèches en entreprises, permettrait aux mères d’augmenter leurs heures de travail. Enfin, pour les travailleurs âgés, l’ajustement des conditions de la retraite anticipée pourrait prolonger leur présence dans le monde professionnel.
L’étude met en évidence un enjeu majeur pour l'économie allemande : l'activation du potentiel de millions de travailleurs encore sous-utilisés. Face à une population vieillissante, à des taux de vacance d'emploi élevés et à une pression économique croissante, il devient crucial de maximiser les ressources humaines disponibles. Les femmes sans enfants, les mères en temps partiel, les migrants, et les travailleurs âgés représentent des réserves précieuses qu'il est urgent de mobiliser.
Pour répondre à ce défi, des réformes structurelles s'imposent, notamment dans les domaines de la fiscalité, de la garde d'enfants, et des incitations à travailler plus longtemps. L'Allemagne possède un potentiel considérable pour renforcer son marché du travail et soutenir sa croissance économique, à condition de prendre les mesures nécessaires pour intégrer ces groupes sous-représentés.
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Jérôme Lecot