L'histoire des bonbons Haribo : une entreprise familiale allemande
Fondée en 1920 par Hans Riegel à Bonn, Haribo est devenue l'une des marques de confiserie les plus emblématiques au monde et une figure légendaire de l'une des plus belles success-story de l'Allemagne d'après-guerre. Nous explorons l'impact d'Haribo sur le marché mondial de la confiserie et les défis auxquels cette entreprise familiale allemande fait face dans un secteur en constante évolution.
2. Un esprit de famille
3. Les goûts et les couleurs changent d'un pays à l'autre
4. Un empire familial sous le signe de la discrétion
5. Haribo aujourd'hui
Dans le quartier de Kessenich à Bonn, une rue porte le nom de Hans Riegel. Un écrivain ? Un homme politique ? Pas du tout, Hans Riegel, c'est l'inventeur de Haribo.
"Le nom vient de "Ha" pour Hans, "Ri" pour Riegel et "Bo" pour Bonn", explique fièrement un habitant du quartier qui vit juste en face de l'usine. "On peut dire qu'il a révolutionné le monde des bonbons", poursuit le Bonnois qui, chaque matin, hume l'odeur de réglisse sucrée qui flotte dans l'air.
C'est à quelques mètres, dans la Bergstraße, que l'histoire débute. En 1920, Hans Riegel, installe une confiserie improvisée dans une arrière-cour. En 1923, il donne naissance au célèbre Goldbär, un ourson en gélatine inspiré des ours dressés, alors très populaires dans les fêtes foraines et sur les foires.
La légende raconte qu'à l'époque, le confiseur bonnois ne possédait qu'un sac de sucre, un four et un chaudron de cuivre. Gertrud, sa femme, assurait la livraison de la production quotidienne à vélo.
Dans le quartier de Kessenich, un complexe de bâtiments et d'usines en briques rouges, coincé au milieu des ruelles et des immeubles d'habitations, remplace la petite confiserie d'autrefois. Le célèbre Goldbär jaune affublé d'un nœud papillon rouge est placardé sur la façade de l'entreprise, et nous invite à pénétrer dans cet univers haut en couleur. Dans l'entrée du siège social, les multiples prix et trophées sont accrochés au mur à côté des photos de famille, de celles des employés et du père fondateur.
À la mort du fondateur, Hans Riegel père, en 1945, ses deux fils, Hans Riegel junior et Paul, reprennent les rênes de l'entreprise et adoptent une politique d'expansion qui fera de la petite entreprise, le numéro 1 du bonbon en Europe.
Aujourd'hui, 160 millions de nounours sont fabriqués chaque jour. "Mis bout à bout, les oursons gélifiés produits en une année permettraient de faire dix fois le tour de la Terre", peut-on lire sur le site Internet de l'entreprise.
L'une des raisons du succès de la marque, c'est sa recette marketing très efficace. Qui ne connaît pas la ritournelle "Haribo macht Kinder froh und Erwachsene ebenso" en allemand (Haribo c'est beau la vie, pour les grands et les petits) ? Et qui ne vient pas d'ailleurs de fredonner la mélodie, à la lecture de cette phrase ?
Depuis 1930, Haribo n'a jamais changé son slogan. Pour conserver néanmoins une image innovante, pas moins de 80 nouveaux bonbons sont mis sur le marché chaque année. Un rythme effréné qu'aucun concurrent ne parvient à suivre, pas même Carambar & Co ou Katjes.
Le groupe a également su s'adapter aux palais de chacun. Les nounours et schtroumpfs allemands sont plus durs que les français, et ils sont plus mous dans les pays du sud. En Scandinavie par exemple, la réglisse est plus salée qu'en Espagne. En matière de bonbons, les Européens n'ont pas tous les mêmes envies.
Les Allemands sont majoritairement restés fidèles au traditionnel ours gélifié, les Belges préfèrent les cerises ou les crocodiles. Les Français, eux, raffolent davantage de la fraise Tagada. 3 000 de ces fraises sont avalées chaque minute en France !
Jean-Philippe André, ancien président du directoire de Haribo France (2006 - 2023), explique :
"La raison est historique. La célèbre fraise vient de chez nous, elle est née en 1969 dans l'usine de Marseille, rachetée par Haribo en 1961. La filiale française a principalement axé sa communication sur ce produit phare."
En France, le géant du bonbon possède d'ailleurs un musée entièrement dédié à la marque, à Uzès, dans le Gard, le seul Musée du Bonbon Haribo au monde.
Haribo sait effectivement se faire remarquer. En Allemagne, la marque est même allée jusqu'à repeindre intégralement l'un des Boeing B737 de la compagnie aérienne TuiFly.
Outre-Rhin, le très célèbre Thomas Gottschalk était pendant 24 ans le visage de Haribo. L'animateur de télévision mangeait même des Gummibären sur le plateau de l'émission Wetten, dass..? (suivie par près de 20 millions de téléspectateurs à chaque diffusion) et en proposait à tous ses invités.
La marque jouit d'une incroyable notoriété. 98 % des Allemands connaissent le nom. En revanche, son patron, Hans Riegel, prenait soin de se tenir à l'écart des médias. Par tradition, le groupe reste discret et la marque refuse tout triomphalisme, malgré un chiffre d'affaires estimé à 3 milliards d'euros par an.
Haribo ne communique ni sur ses résultats financiers, ni sur sa stratégie de développement. Une chose est sûre, le patriarche souhaitait que Haribo reste dans les mains de la famille.
Depuis 2011, la firme est coiffée par une holding détenue à 50 % par Hans Riegel et à 50 % par les descendants de son frère Paul. Hans Riegel Junior (1923 - 2013) était sans enfant et avait passé plus de 67 ans à la tête de l'entreprise. Ses parts ont été transférées dans une fondation privée (Dr. Hans Riegel Foundation) dont l'objet est de faire perdurer Haribo comme entreprise familiale.
Depuis 2010, il partageait avec deux de ses neveux, Hans-Guido et Hans-Arndt, la direction du groupe, où il avait gardé la haute main sur le service marketing. À 90 ans, il était encore presque chaque jour à son bureau de Bonn.
Depuis 2013, Haribo poursuit son développement de manière très notable, renforçant sa position de leader sur le marché mondial des confiseries. L'entreprise a élargi sa gamme de produits en lançant de nouvelles variétés de bonbons, tout en mettant l'accent sur des ingrédients de qualité et des recettes vegan et des options sans gluten.
Haribo a également intensifié ses efforts en matière de durabilité, visant à réduire son empreinte environnementale à travers des initiatives de packaging éco-responsable. L'expansion géographique a été une priorité, avec l'ouverture de nouvelles filiales et le renforcement de sa présence dans des marchés émergents.
En parallèle, Haribo a investi dans des campagnes marketing innovantes pour séduire une clientèle toujours plus jeune, tout en préservant son image emblématique.
Aujourd'hui, Haribo produit dans 11 pays, emploie plus de 7 000 personnes et exporte ses oursons, Tagada, Dragibus ou rouleaux de réglisses dans plus de 100 pays.
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Olivier Geslin