Expatrié en Allemagne : nos conseils pour survivre au choc culturel
Ponctualité, rigueur, assiduité sont des qualités que l'on associe souvent aux Allemands. Mais sont-elles vraies ? Pour réussir professionnellement en Allemagne, il faut connaître la vision du travail de vos collègues et tenir compte de certaines particularités pour s'intégrer au mieux. Le choc culturel sera peut-être inévitable, mais une bonne préparation vous aidera à évaluer correctement les situations au travail et à faciliter votre intégration. Nous vous expliquons les différentes phases du choc culturel en tant que Français en Allemagne et comment y faire face.
2. Les habitudes de travail en Allemagne
3. S'adapter et faire face aux différentes phases du choc culturel
Commençons par le plus important, la communication. Si vous êtes surpris par le comportement de vos collègues allemands, voyez d'abord dans quelle mesure celui-ci est impacté par le cadre dans lequel vous vous trouvez. Ensuite, pensez aux manières par lesquelles vous pouvez changer et influencer cette situation. Dans tous les cas, le mieux est d'en parler ouvertement avec vos collègues, car l'ouverture et la franchise sont très appréciées en Allemagne. Attention, la manière de communiquer peut varier.
De même, vous pouvez leur faire part d'autres expériences que vous avez faites à l'étranger. Donnez à vos collègues allemands l'occasion de mieux vous connaître et de comprendre votre parcours professionnel. Seul un dialogue mutuel vous permettra de clarifier immédiatement des situations embarassantes ou désagréables avec vos collègues et de pouvoir les éviter à l'avenir.
Il est toujours tentant de comparer les manières de faire en France et en Allemagne, mais cela peut être un frein à la compréhension de ses collègues : tandis que les négociations à la française peuvent sembler superficielles ou même évasives à un Allemand, la façon allemande d'aborder les enjeux de manière directe peut donner l'impression au partenaire français d'un manque de sympathie, d'empathie voire de confiance.
Après avoir franchi ce premier obstacle, il s'agit de cerner l'esprit de fonctionnement au sein d'une entreprise. Si en France on a tendance à respecter l'autorité et à remettre des règles en question, en Allemagne on conteste l'autorité mais on respecte les règles.
Cela dit, en pratique : en France, c'est le chef qui prend les décisions importantes et qui laisse pourtant au personnel l'espace à l'improvisation, tandis qu'en Allemagne on ne change plus rien à une décision prise en communauté. L'esprit d'équipe est une compétence très prisée en Allemagne.
Séparer la vie professionnelle de la vie privée
En Allemagne, la séparation de la vie professionnelle (Berufsleben) et de la vie privée (Privatleben) est majoritairement strictement respectée. Cela signifie que les collègues allemands préfèrent ne pas parler de leur vie privée ou révéler des détails personnels. C'est pourquoi ils sont plutôt réservés au travail et deviennent maîtres dans l'art du small talk. Cela signifie qu'en Allemagne, le cadre du travail n'est pas forcément idéal pour se faire des amis, du moins pas dès le début de la relation collégiale. Après une longue phase de rencontre et si l'on constate des intérêts communs, il est tout à fait possible que des amitiés privées se développent. Mais au début, on garde plutôt ses distances.
Pourquoi cela ? Et bien, en Allemagne, l'accent est mis sur l'efficacité du travail pendant les heures de service. Certains Allemands associent donc le travail à l'utilisation de leur force de travail et non à la construction de relations.
Commencer sa journée de travail plus tôt
La préférence pour un emploi efficace se manifeste également par un début de travail matinal. Cela signifie qu'il n'est pas si rare que vos collègues allemands arriveront à leur poste dès 7h30.
À quoi cela est-il dû ? Au fait que les familles avec enfants dépendent des horaires d'ouverture des crèches, jardins d'enfants et écoles : les collègues avec enfants sont parfois obligés de commencer le travail tôt afin de pouvoir aller chercher leurs enfants à 16h00 ou 16h30.
Les Allemands ont également de nombreux loisirs à côté de leur travail. Il est donc parfois important pour eux de terminer leur journée de travail tôt, à 16h00 voire 17h00, afin de pouvoir s'adonner à leurs passe-temps ou régler leurs affaires personnelles le soir.
Bien sûr, cela concerne surtout les emplois de bureau avec des horaires de travail planifiables. On peut s'en douter, il y a toujours les autres extrêmes : les collègues qui restent très tard au bureau.
Utiliser des éloges et du feedback positif avec modération
En Allemagne, on attend de tout employé qu'il remplisse ses obligations avec soin et conformément aux exigences du travail. C'est pourquoi les bonnes performances sont considérées comme allant de soi et ne sont pas particulièrement mises en avant. Cela conduit parfois les cadres à rarement féliciter leurs collaborateurs lorsqu'ils font "simplement" bien leur travail.
En revanche, les commentaires critiques arrivent plus rapidement lorsqu'une erreur est commise. Cela donne cette impression qu'en Allemagne, on ne félicite que très peu et on ne fait que critiquer.
Ce point est peut-être le plus difficile à comprendre, car dans d'autres cultures, il est naturel de souligner positivement les bonnes performances. En Allemagne, si aucun feedback positif n'est donné, on peut vite avoir l'impression de faire quelque chose de mal. Ce n'est pas forcément le cas, car comme nous l'avons indiqué plus haut, les bonnes performances sont attendues et ne sont pas considérées comme quelque chose de spécial.
L'importance des protocoles et des structures
L'importance de l'efficacité se reflète également dans la définition des routines de travail. En Allemagne, les protocoles et les structures établies sont importants dans l'entreprise. Il est attendu de procéder de la manière dont les processus l'exigent. Les objectifs auront alors toutes les chances d'être atteints.
Les solutions créatives ne sont pas toujours les bienvenues. Il est plutôt apprécié de suivre toutes les étapes prescrites soigneusement et de respecter les réglementations.
Il est important de comprendre que, dans ce contexte, le rejet de propositions ne constitue pas nécessairement une critique personnelle, mais qu'il se fait dans l'esprit des protocoles déjà établis.
Se focaliser sur les résultats
En Allemagne, il est important d'obtenir des résultats mesurables. Il ne suffit pas de faire quelque chose et de s'y donner beaucoup de mal. Finalement, ce qui compte, c'est le résultat. Ici aussi, les attentes sont élevées et ne sont pas liées à la personne, mais au poste occupé.
C'est pourquoi il faut veiller à ne jamais perdre de vue les résultats. L'orientation vers les objectifs est très appréciée en Allemagne.
Être sérieux
En Allemagne, on prend son travail et ses tâches très au sérieux. Les résultats passent en premier et les sentiments personnels ne viennent qu'ensuite. Comme mentionné plus haut, le temps de travail est généralement utilisé de manière très efficace. Les distractions ne sont pas tolérées. Les longues discussions personnelles en font partie. C'est pourquoi les collègues semblent parfois concentrés et très sérieux.
Il va de soi qu'il existe de grandes différences personnelles. Il est important de ne pas confondre le sérieux professionnel avec un rejet personnel. Si quelqu'un ne sourit pas, cela ne signifie pas automatiquement qu'il ne vous apprécie pas.
Communiquer de manière directe
La communication directe s'inscrit également dans l'image globale d'une méthode de travail efficace en Allemagne.
Le feedback direct permet de résoudre rapidement les conflits et de clarifier les malentendus afin de rétablir un processus de travail correct. C'est pourquoi il peut arriver que votre supérieur vous parle directement d'erreurs ou de désaccords, sans tenir compte de votre état d'esprit personnel ni écouter les raisons de votre mauvais comportement.
Dans ce cas également, il est important de savoir que le feedback direct n'a pas pour but de vous insulter personnellement ou de dévaloriser vos performances. Si vous venez d'une culture où la communication est plus douce et plus diplomatique, il se peut que vous soyez déçu en Allemagne et que vous vous sentiez souvent traité de manière impolie.
Soyez prêt à considérer le feedback professionnel comme une critique de votre méthode de travail, mais pas automatiquement de votre personne.
Comme pour un iceberg, seule une petite partie d'une culture, notre comportement, est visible. La partie beaucoup plus importante, nos normes, valeurs et attitudes, est invisible mais n'en influence pas moins ce qui reste à la surface.
D'autre part, ces valeurs et attitudes sont également influencées par des aspects plus profonds, comme l'histoire ou simplement le cadre juridique.
Sortir de la zone de confort et partir vers l'inconnu
Découvrir une autre culture, c'est comme un petit voyage de découverte et des montagnes russes d'émotions : un nouveau défi inconnu vous attend à chaque coin de rue.
On essaie de s'intégrer parfaitement, d'éviter les faux pas. L'expérience montre qu'il faut un certain temps pour que l'étrangeté avec d'autres comportements s'estompe.
Pendant cette période, vous pouvez vous sentir déstabilisé, confus ou stressé. On appelle ce phénomène scientifiquement étudié le choc culturel. Mais ne paniquez pas, cela arrive à toute personne qui s'expatrie pour travailler ou vivre à l'étranger.
Un choc culturel peut être divisé en 5 phases, généralement représentées par une courbe, similaire à celle de la vidéo ci-dessous (en anglais).
Phase 1 : la lune de miel
Dans la première phase, l'expérience s'apparente à une belle lune de miel (Honeymoon-Phase), tout va bien. On se réjouit de son nouveau travail, peut-être de sa nouvelle vie dans un autre pays. On a de grandes attentes et on voit tout "à travers des lunettes roses" (durch eine rosarote Brille, comme disent les Allemands). Vous avez appris par cœur les expressions allemandes à connaître pour briller au travail, et vous vous lancez.
Phase 2 : le choc culturel
Vous voilà arrivé dans la deuxième phase, la phase de choc culturel, les choses commencent à se gâter. Vous avez réussi à passer les premiers jours mais les premières difficultés de compréhension apparaissent. On se sent de plus en plus déstabilisé, l'irritation se transforme en frustration.
Phase 3 : l'ajustement
Dans la troisième phase, la phase d'ajustement, on voit la lumière au bout du tunnel (Licht am Ende des Tunnels). Les expériences sont relativisées et les attentes élevées de la phase initiale deviennent plus réalistes. On commence à s'adapter à l'autre culture.
Phase 4 : l'adaptation
Dans la quatrième phase, la phase d'adaptation, tout s'arrange. On se sent de plus en plus à l'aise dans l'autre culture et on intègre la nouvelle culture dans son quotidien.
Phase 5 : le choc culturel en sens inverse
Le choc culturel est de retour chez soi ! La cinquième phase est celle de choc culturel par rapport à son pays d'origine (Rückkehr-Kulturschock-Phase). On s'est si bien adapté au mode de vie allemand qu'un nouveau choc s'opère lorsqu'on reprend un travail en France après un certain temps. Les quatre premières phases se répètent alors...
Conclusion de ces 5 phases
L'évolution réelle de cette courbe est individuelle et dépend entre autres de l'expérience interculturelle que vous avez déjà, de votre familiarité avec l'autre culture et du fait d'avoir effectué un déménagement vers l'Allemagne ou que vous rentriez chez vous le soir en France.
Si vous travaillez en tant que frontalier français en Allemagne, votre environnement social reste le même, et le choc culturel se limite uniquement au travail.
Si vous déménagez outre-Rhin et que vous inscrivez par exemple vos enfants dans une école allemande, vous serez confronté à davantage de changements, de sorte que la courbe peut être plus prononcée.
Dans tous les cas, la règle est que cela passe normalement ou, comme on dit en Allemagne : "Es wird schon gut gehen!"
Qu'est-ce que la culture au juste ?
Il existe de nombreuses définitions de la culture ainsi que d'innombrables métaphores pour la décrire. Les cultures ont toutes un point commun : elles partent du principe que seule une petite partie d'une culture est visible. La plus grande partie d'une culture est donc invisible : les normes, les valeurs et les attitudes.
Celles-ci se sont développées au fil du temps, sont profondément enracinées et sont, consciemment et inconsciemment, transmises de génération en génération. Elles sont donc apprises et non innées. Ces facteurs influencent la manière dont nous percevons le monde qui nous entoure et ce que nous faisons. Ils nous semblent si normaux et évidents que nous n'en sommes même pas conscients. Cela ne change qu'au contact de personnes d'une autre culture, par exemple lors d'un changement de travail dans un pays voisin.
Les comportements appris, auxquels vous ne pensez normalement pas en France, ne sont soudainement plus valables. Les règles sont différentes en Allemagne. Logique, car l'évolution historique est différente et d'autres comportements et mentalités se sont donc formés.
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