S'expatrier à Berlin : 5 témoignages de Français qui y vivent
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Nombreux sont les Français souhaitant vivre et travailler à Berlin, mais ne disposant pas d'un niveau courant en allemand. Serait-ce raisonnable de s'installer dans la capitale allemande sans une maîtrise suffisante de la langue allemande ? Les membres de notre Club d'expatriés franco-allemands ont pu conseiller Hélène, une candidate française, souhaitant justement s'expatrier à Berlin.
2. La recherche d'emploi doit être bien réfléchie : le témoignage de Franck
3. Il faut se lancer directement : le témoignage de Zoé
4. Savoir bien s'intégrer à la vie berlinoise : le témoignage de Laurent
5. La belle vie à Berlin malgré le manque de la famille : le témoignage de Sandra
Hélène, mère de famille âgée de 31 ans, souhaite s'installer à Berlin et y trouver un emploi dans le domaine de la communication, malgré ses lacunes linguistiques.
Voici comment Hélène présente son profil et résume ses attentes en face des expatriés français vivant en Allemagne depuis quelques années :
"Je désire partir travailler à Berlin. Je suis diplômée d'un bac +5, maîtrise bien l'anglais, mais ne parle pas un seul mot d'allemand. J'envisage de prendre des cours de langue une fois installée sur place. Je suis à la recherche d'un emploi dans le marketing, si possible dans l'industrie de la musique, car c'est ma passion."
Les réactions ne se font pas attendre...
Franck, installé à Berlin depuis environ 20 ans à l'issue de ses études d'allemand et de traductologie, nous partage sa longue expérience et ses différentes étapes pour maîtriser la langue de Goethe.
En découvrant les attentes d'Hélène, il s'est dit, comme nombre d'autres membres, qu'elle était bien naïve de penser pouvoir venir travailler en Allemagne sans la moindre maîtrise de la langue allemande.
Tout d'abord, il lui a fallu du temps pour saisir les différences de mentalité entre l'Allemagne et la France, les comprendre, puis les intégrer. Voici la réaction de Franck :
"D'après ce que j'ai compris, tu veux partir selon le principe : impossible n'est pas français. Ceci n'est pas forcément négatif, mais si tu veux réussir ton projet, pars avec une stratégie plus élaborée que : Je cherche d'abord un emploi, même mal payé, et l'apprentissage de la langue se fera plus ou moins tout seul ensuite."
Même si beaucoup d'Allemands sont bienveillants et ont une opinion plutôt francophile, on se rendra très rapidement compte, une fois sur place, que sans les connaissances linguistiques suffisantes, ni même des rudiments au départ, l'expatrié risquera de s'essouffler rapidement.
En ayant un job dans un call-center à Berlin, par exemple, il est fort probable que cet emploi mobilise l'ensemble des capacités physiques et mentales de l'expatrié, ce qui rendrait la possibilité de prendre des cours d'allemand après le travail quasiment impossible.
De plus, dans un contexte et milieu international, le risque serait que par désagrément de pratiquer un allemand qui est loin d'être parfait à la base, l'expatrié français se retrouvera tenté de ne pratiquer que l'anglais.
Trouver un emploi sur place est donc certainement la première des priorités, mais les autres éléments, qui permettront de faciliter son installation dans un nouvel environnement, ne sont pas à négliger.
Comment apprendre l'allemand sur place : les conseils de Franck
Tout d'abord, optez pour un emploi à Berlin à mi-temps, pour avoir l'autre moitié du temps pour suivre des cours d'allemand.
Ensuite, fixez-vous un objectif réaliste du niveau que vous souhaitez atteindre au bout d'une certaine période. Par exemple, on peut viser A2 sur 3 mois. L'expatrié pourra ainsi plus rapidement exploiter les connaissances acquises de manière interactive.
Essayez de trouver un logement dans une famille ou une colocation pour avoir l'occasion quotidienne de mettre en pratique ce que vous avez appris. Pour progresser encore plus rapidement, vous pouvez rechercher un tandem franco-allemand sur les réseaux sociaux.
Continuez ensuite à lire en allemand tout ce qui peut vous tomber sous la main. Ceci vous permettra d'acquérir une sensibilité grammaticale exploitable dans la pratique et à l'écart de toutes les règles de grammaire à apprendre par cœur. Regardez également la télévision allemande, afin de retenir nombre d'expressions et de tournures utiles pour tout type de situations de la vie quotidienne.
Zoé possède une expérience plus courte outre-Rhin et se reconnait dans le parcours d'Hélène. Elle a suivi son conjoint et est arrivée à Berlin en 2019 sans parler un mot d'allemand.
Elle parlait bien anglais mais n'avait mis un point d'honneur à ne parler qu'allemand pour une intégration rapide. Elle a donc pris 6 mois de cours d'allemand à la Volkshochschule, afin d'obtenir son certificat.
Deux semaines plus tard, elle a trouvé du travail dans un service client d'une start-up allemande qui cherchait quelqu'un parlant français et anglais. Zoé nous explique :
"Je suis restée 6 ans en Allemagne et revenue quasisement bilingue. J'ai rencontré des Allemands très patients et heureux de voir quelqu'un qui essaye de parler leur langue, même si ma maîtrise n'était pas toujours correcte. Je conseille de prendre quelques cours avant en France et de se lancer directement. C'est toujours une belle expérience même si ça sera difficile parfois !"
Laurent, un autre ambassadeur de notre Club d'expatriés franco-allemands, ajoute une pointe d'humour lors de cet échange. Il lui pose ouvertement les 10 questions suivantes qui sont pour certaines plutôt stéréotypées :
- Avez-vous une sensibilité prononcée pour l'écologie ?
- Pensez-vous devenir végane et changer radicalement votre alimentation pour le bien-être de la nature ?
- Aimeriez-vous vivre en colocation jusqu'à l'âge de 38 ans ?
- Rêvez-vous de rejoindre une équipe motivée dans une start-up très branchée ?
- Avez-vous déjà brunché ?
- La pluie et le ciel gris 300 jours par an ne vous impressionnent pas ?
- Vous aimez les tenues des années 80/90 et la minimal techno ?
- Vous êtes égocentrique, mais vous n'arrivez pas à faire croire le contraire ?
- Vous aimez parler de culture parce que la culture c'est hyper bien ?
- L'événementiel et le digital sont des priorités pour vous ?
"Avant votre arrivée, il est important de faire un point. Si vous répondez OUI à l'ensemble de ces questions, quelle que soit la période à laquelle vous arriverez, votre niveau d'allemand s'améliorera automatiquement. Tout se passera très bien pour vous ici, à Berlin."
Sandra, Française à Berlin depuis 6 ans, s'est installée dans la capitale au terme d'un voyage épique, pendant lequel elle s'était imbibée de café brûlant concocté par la British Airways. Tout avait commencé dans un aéroport londonien avec neuf autres Neuberliner intrépides...
À cette époque, Sandra participait au programme Erasmus+, et le froid ainsi que l'inhospitalité de la capitale allemande les ont poussés à s'accrocher les uns aux autres la majeure partie des trois mois passés sur place.
Finalement, elle ne devait pas en rester là. Elle a donc dit au revoir à ses nouveaux amis et a entrepris de faire sa vie à Berlin. Formulé ainsi, ça peut paraître facile, mais ça ne l'était pas !
Il y a eu des heurts. Par exemple, en matière de séduction, les hommes semblaient s'enfuir en courant dès qu'elle essayait de capter leur regard ! Elle en a rapidement conclu que le seul moyen de trouver chaussure à son pied serait de rentrer définitivement au Royaume-Uni. Trois jours plus tard, elle a fait connaissance de l'homme (allemand) avec lequel elle a décidé de passer le restant de ses jours....
Trois ans après le début de son aventure allemande, sa progéniture germano-britannique est née, et, d'une certaine manière, c'était une renaissance pour elle. Oui, cela peut paraître kitsch, mais une foule de "petits trucs" (Kleinigkeiten) lui ont soudain parue totalement insignifiants. Sandra nous confie :
"Bien sûr, ma famille et mes amis me manquent terriblement, et je ressens une petite pointe de jalousie quand je réalise que les gens qui habitent près de leurs proches peuvent s'appuyer sur leur famille dans tous les domaines de l'existence. Mais j'adore la vie que nous nous sommes construite ici, et je ne regrette pas le moins du monde d'avoir décidé de rester à Berlin il y a six ans !"
Malgré ses études d'allemand, elle avait encore du mal à parler la langue. Cependant, il y a une excellente communauté d'expatriés français à Berlin, et cette découverte lui a empêchée de devenir folle. Par la suite, elle est parvenue à gagner la confiance de certains autochtones et à se faire de bons amis allemands.
En savoir plus :
- Recherche d'emploi ou de stage à Berlin : questions et réponses
- Vivre à Berlin en famille : établissements scolaires, loisirs et retraite
- Travailler en Allemagne sans parler allemand : nos 10 conseils
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Olivier Geslin
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